samedi 7 avril 2018

Peut-on être condamné pour promesse non tenue?

Les promesses rompues sont souvent des sources de conflits. Car, elles sont généralement interprétées comme des obligations auxquelles se sont soustraits les promettants. Ce n’est pas étonnant qu’une promesse non respectée entre deux individus tourne leur relation au vinaigre. La situation peut même devenir conflictuelle au point d’en appeler à une solution de justice. En Haïti, il est coutume de dire que toute promesse est une dette (Pwomès se dèt). Promettre c’est devoir. La promesse oblige. Chose promise, chose due. A cet égard, celui qui promet se trouve dans l’obligation d’exécuter son engagement ou sa parole. Ce n’est ni totalement faux ni totalement vrai. La parole donnée est-elle toujours sacrée ou du moins l’est-elle uniquement sur le plan moral ? En fait, où réside la vérité dans les circonstances de promesse ?

Les circonstances de promesse sont multiples dans la réalité sociale. Tout ce qui crée une relation morale entre les membres de la société peut être apparenté à une forme de promesse. Les formes les plus courantes sont la ponctualité et la fidélité. On se promet toujours d’être ponctuel et d’être fidèle. D’un point de vue pragmatique, l’on comprend qu’il est plus facile de promettre que d’exécuter. La promesse est ainsi devenue un principe de moralité sociale. Elle s’impose comme un devoir, une obligation morale de respecter la parole donnée ou d’accomplir des actes bien définis. Considérant que la promesse ne peut être qu’une règle de moralité ou une simple question d’éthique personnelle, la loi détermine les conditions dans lesquelles la promesse peut faire l’objet d’une action judiciaire en cas de non observance.      

Lorsque deux individus se font une promesse (promesse synallagmatique) ou que l’un promet à l’autre (promesse unilatérale), il s’agit bien évidemment de la prise d’un engagement. Cet engagement peut entrainer des conséquences juridiques si l’objet auquel il se rapporte est un contrat. Si l’objet de l’engagement n’est pas un contrat, c’est une simple promesse, disons, une manifestation de générosité. Et, nul ne peut être condamné pour avoir cessé d’être généreux. Toute promesse qui prend la forme d’un précontrat doit être exécutée au risque de condamner celui qui n’a pas respecté son engagement à verser des dommages et intérêts. Voilà pourquoi on ne peut pas rompre,  sans s’exposer à des conséquences juridiques très sérieuses, des promesses de vente ou d’achat, des promesses de mariage (fiançailles), des promesses d’embauche, des promesses de bail (location d’habitation à loyer), des promesses administratives (faites par des autorités administratives).

Par ailleurs, dans les circonstances où un individu s’est vu promettre par un ami une somme d’argent nécessaire au paiement de son loyer et qu’au dernier moment le promettant rétracte sa décision de l’aider, il n’y a pas matière à intenter une action civile  sur la base de rupture de promesse puisque l’objet de l’engagement ne consiste pas en un acte d’accomplissement d’un contrat. Dans ce cas-ci, c’est uniquement la relation d’amitié qui pourra être détruite ou tout au moins grièvement affectée du point de vue moral. Même s’il faut dire que la tentation d’agir en justice est très forte en raison des espoirs brisés par le retrait de la promesse. Techniquement, le promettant est libre d’exercer son droit de rétractation quand il s’agit de simple promesse, il n’est pas soumis par la loi à aucune obligation en cas de refus de générosité.

Bref, la promesse est une obligation morale et juridique. Quand la promesse est tout uniment morale, le promettant peut s’arroger le droit de ne pas respecter la parole donnée si les circonstances ne lui sont plus favorables. Il n’y a aucune obligation absolue de tenir une promesse purement morale. Toutefois, quand la promesse est de nature juridique, elle est assimilée à un précontrat. Le promettant ne peut se réserver impunément la possibilité de rompre une telle promesse. Elle est susceptible d’entrainer une action civile, donc le versement d'une somme d'argent en cas de rétractation.                   

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Avocat et Magistrat de profession.